Témoignages

Julie, prof indépendante de FLE et d’espagnol en Espagne

Je vous propose le témoignage de la pétillante Julie qui enseigne le Français Langue Etrangère en Espagne ainsi que l’espagnol à son compte. Bonne lecture !

Est-ce que tu peux te présenter ?

Je m’appelle Julie, je suis lyonnaise, j’ai 27 ans et j’habite actuellement en Espagne, à Cordoue, en Andalousie. 

Quel est ton parcours académique ?

Après le collège, j’ai décidé de ne pas aller dans mon lycée de secteur, car il ne proposait pas la section européenne espagnole. Je suis donc arrivée en seconde générale et j’ai terminé avec un bac L, section européenne et anglais renforcé. J’ai toujours aimé l’espagnol, même si au début les verbes irréguliers m’ont donné un peu de fil à retordre mais il a suffi d’un voyage à Barcelone pour me rendre amoureuse du monde hispanique. 

Lorsque j’ai dû faire mes choix d’orientation, j’étais donc sûre que je voulais continuer mes études dans l’espagnol. J’ai donc fait une Licence LLCER à Lyon, un Erasmus à Salamanque, en Espagne et j’ai terminé mes études académiques avec un Master MEEF espagnol

J’ai toujours eu un attrait pour l’enseignement. Et j’ai su très tôt (au collège) que je voulais devenir professeure. Au cours de mon Master MEEF j’ai pu réaliser un stage dans un collège et dans un lycée. Mon expérience était un peu mitigée, j’étais à la fois contente de pouvoir voir l’enseignement sur le terrain mais déçue de l’organisation. En effet,  je ressentais beaucoup de stress de la part des professeurs mais aussi de la déception en ce qui concerne leurs conditions de travail. 

Malgré tout, je me suis inscrite au CAPES d’espagnol, car je gardais à l’esprit que mon but principal était d’aider les élèves dans leur apprentissage de la langue. Je me suis présentée trois fois au CAPES, trois années consécutives, mais je ne l’ai jamais eu. Je n’ai jamais pris le temps d’analyser cette non-réussite (je ne parle pas d’échec) mais maintenant que j’y suis, je dirais qu’au fond de moi, j’avais arrêté d’y croire. 

Trois ans de CAPES, c’est long. C’est beaucoup de stress, beaucoup d’investissement et de sacrifice. J’étais donc tout simplement fatiguée et je souhaitais m’épanouir et grandir dans un environnement qui me ressemblait plus. Je ne regrette absolument pas car ma vie a pris un tout autre tournant après ces années de concours. Toute cette expérience fait de moi une meilleure professeure, car oui, j’ai réussi à être professeure ;). 

Peux-tu nous décrire ton expérience en tant qu’assistante de français ?

Après mes trois années de concours, j’ai décidé de partir comme assistante de langue en Espagne. J’avais le choix entre trois communautés autonomes : L’Andalousie, La Galice et Castilla La Mancha. 

J’ai donc commencé mon aventure d’assistante de langue en Andalousie dans la magnifique ville de Cordoue. Cela a été ma première expérience dans l’enseignement.  J’ai travaillé au côté de professeurs vraiment incroyables qui en plus de me donner l’opportunité d’animer des cours, sous leurs regards avisés, m’ont également redonné confiance en moi. Je suis restée deux ans dans le même établissement. 

J’ai enseigné les matières dites DNL (disciplines non linguistiques). Et c’est en enseignant des matières comme le sport ou la technologie que j’ai pris conscience que je voulais vraiment être professeure.  Le fait de ne pas enseigner des matières que je maitrisais m’a fait prendre conscience que j’aimais profondément transmettre et aider les élèves à mûrir et surtout penser par eux-même ! 

A côté de cela, je donnais des cours particuliers dans tout Cordoue, à des enfants, à des ados et à des adultes. Je fixais mes prix, mes conditions et je travaillais selon ma méthodologie. Et sans le savoir, j’ai commencé à dessiner mon futur métier. 

Que fais-tu aujourd’hui ? 

Aujourd’hui je suis professeure indépendante. Je donne des cours en ligne de FLE à des hispanophones, et des cours d’espagnol à des francophones. 

Je travaille avec un centre de formation en France, je donne quelques heures dans des académies à Cordoue puis j’ai mes cours et ateliers de conversation avec mon entreprise

Je n’avais jamais pensé un jour enseigner le FLE mais finalement j’ai trouvé un équilibre : mon master MEEF espagnol me permet de comprendre où sont les fautes de mes élèves hispanophones et donc les aider de manière plus pertinente dans le français.  

Pourquoi être devenue freelance ? Est-ce difficile d’en vivre ?

Je dirais pour toutes les raisons que j’ai énoncées précédemment; le concours, les conditions de travail et le stress. Alors ça ne veut pas dire qu’en étant indépendante je n’ai pas de stress, mais disons que c’est plus facile à gérer pour moi. Ce qui a pesé dans la balance c’est que je peux gérer mon emploi du temps, adapter mes cours à ma méthodologie et ma créativité, et surtout trouver des élèves qui me ressemblent. 

C’est difficile si tu te convaincs que ça l’est ! Je me suis lancée dans l’aventure car je sentais que c’était le moment ou jamais. J’ai étudié quelques aspects comme où habiter, comment, avec quels moyens et j’ai créé mon entreprise.

Économiquement, ça dépend pour qui, moi je pars à partir de rien, je n’ai pas beaucoup d’argent de côté, donc il y a ce stress “est-ce que je vais arriver à payer mon loyer ?”, “à rentrer en France pour voir ma famille pendant les vacances ?”. Mais je dirais que cette insécurité économique me pousse à avoir confiance en mon travail et les prix que je propose. 

Il faut avant tout développer un bon état d’esprit lorsqu’on devient indépendant. Depuis le début, je sais que je ne le fais pas que pour l’argent, évidemment que j’ai envie de gagner ma vie correctement, mais ce qui m’encourage c’est de voir mes élèves progresser semaine après semaine et surtout de me sentir épanouie dans mon travail. 

Avant même de créer son entreprise il faut croire en soi. Le projet, les cours, la méthodologie se développent après. Mais si nous ne sommes pas convaincus, le chemin sera long…. 

Quel est profil de tes étudiants ? 

Je donne cours à des hispanophones et des francophones qui souhaitent améliorer leurs compétences à l’oral. Je réponds souvent à la problématique “Je comprends la langue mais je ne la parle pas”, “J’ai un blocage lorsque je décide de parler la langue”. J’ai donc créé “La Mesa de Julie”, comme si nous étions à table en train de partager un repas ou un café, dans une ambiance chaleureuse et sans jugement pour pouvoir pratiquer le français ou l’espagnol à l’oral. Je prépare également au DELF / DALF mais toujours en mettant l’accent sur l’oral. 

Comme tu enseignes majoritairement à des espagnols, qu’as-tu remarqué de la culture éducative espagnole ? 

Le traitement professeurs/élèves : Les élèves ne vouvoient pas leurs professeurs et  je dirais qu’ils sont plus proches les uns des autres. Ceci est aussi dû au fait que les professeurs prennent souvent contact avec la famille. Il n’y a pas vraiment de CPE comme en France, ce sont donc les professeurs qui appellent les parents si un élève est absent ou si les notes ne suivent pas. Dans la cour de récréation, les professeurs jouent le rôle de surveillant, ils sont plus souvent avec eux et les connaissent un peu plus. 

La manière d’apprendre : J’ai pu observer qu’on insistait souvent pour que les élèves apprennent par cœur. Ce qui peut aider pour du vocabulaire ou des points de grammaire mais très souvent il n’y a pas de pratique. Donc je me suis souvent retrouvée avec des élèves qui maîtrisaient sur le bout des doigts l’accord du passé composé mais qui, au moment de parler, peinaient à me raconter leur week-end. 

La préparation des cours : Il faut imaginer que je sortais du concours donc que j’étais formatée aux séquences, problématiques, déroulé de séquence, tâches intermédiaires, remédiations mais je n’ai pas vu tout cela en Espagne. J’ai souvent parlé de méthodologie et de pédagogie avec les professeurs mais ils se concentrent plus sur le contenu culturel (je rappelle que j’étais dans des matières DNL). Et c’est là où j’intervenais en tant qu’assistante j’aidais sur les points linguistiques dans les cours d’histoire, comme revoir le passé composé ou l’imparfait, par exemple je pouvais créer un texte à trous sur la Révolution Française. 

Comment prépares-tu tes cours ? 

Mes cours se préparent en deux parties. J’utilise la classe inversée, je dois donc mettre en ligne les documents une semaine à l’avance pour que mes élèves puissent faire les exercices et que je puisse les corriger pour le jour J. Cela requiert donc, autant pour moi que pour mes élèves, de l’implication et de la régularité. 

Je prépare mes cours à l’aide de manuels scolaires. Pour moi ils sont essentiels lorsqu’on commence pour comprendre le déroulé d’une séquence, les points de grammaire à voir étape par étape et les activités. Mais je ne me limite pas seulement aux manuels, très souvent je complète avec des activités que je crée en ligne comme des jeux ou des quiz. Je n’hésite pas non plus à réutiliser les ressources de mes collègues. 

Pour que le cours soit plus fluide, j’organise mes ressources dans un Powerpoint. J’essaye de faire des présentations dynamiques et visuellement agréable. 

Est-ce que la pédagogie est importante pour toi ? 

La pédagogie est pour moi l’élément central de mon travail. J’ai souvent hésité à lancer mes cours et ateliers centrés sur l’oral car je pensais que si les gens voulaient parler une langue étrangère, ils pouvaient trouver facilement quelqu’un. Mais il s’est avéré que non ! Ce n’est pas si simple que cela.

Je me suis rendu compte que la pédagogie était un de mes plus grands atouts ! On ne parle pas pour parler ! La pédagogie m’aide à définir une méthode d’enseignement personnalisée pour mes élèves (la classe inversée). Je réponds à des besoins spécifiques et j’aide mes élèves à surmonter leurs peurs et le stress à l’oral en définissant des parcours et des objectifs réalistes.

Et c’est là que je trouve que mon expérience CAPES m’aide. Pendant ces trois années j’ai appris des méthodes d’enseignement, des mots spécifiques et techniques qui me permettent d’être professionnelle. 

Quels sont tes objectifs à court et moyen terme ? 

Mes objectifs principaux sont de développer mon projet La Mesa de Julie et faire connaître mes cours et ateliers de conversation pour pouvoir aider mes élèves et faire prospérer mon entreprise. 

Me former. C’est important pour moi de me former pour améliorer ma méthode d’enseignement. J’aimerais me spécialiser dans la pratique de l’oral en langue étrangère. 

Apprendre une nouvelle langue étrangère serait un de mes objectifs. D’une part pour voyager et participer à un mariage d’une amie mais aussi pour comprendre et vivre les difficultés linguistiques que peuvent rencontrer mes élèves débutants. 

Quel(s) conseils tu donnerais à des personnes qui souhaitent enseigner le FLE en Espagne ? 

Mon premier conseil serait de savoir parler l’espagnol. Il est essentiel de s’assurer que vos élèves comprennent déjà leur langue maternelle pour ensuite pouvoir leur faire comprendre le français. 

Si vous le pouvez, évitez de travailler dans les académies de langues …  Ou alors choisissez-en une bonne ! Veillez à être bien rémunéré, avoir un contrat et ne pas vous laisser marcher sur les pieds ! 

Enfin, je conseille de s’adapter à la culture du pays. Je ne parle pas de manger des croquetas et boire de la sangria ;P. Je fais plutôt ici référence au traitement que vous pourriez avoir avec vos employeurs. Les espagnols ne sont pas aussi rigides et procéduraux que les français. Alors adaptez-vous ! ;). 

Un mot pour la fin ?

Ne laissez rien ni personne définir qui vous êtes ! 

J’espère que ce témoignage plein de vitalité et de réflexion vous aura inspiré. Pour plus d’articles, rendez-vous sur cette page. A bientôt !

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